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Quel statut juridique choisir pour son entreprise

La notion d’entreprise est un terme générique englobant la multiplicité des structures qu’un entrepreneur peut avoir à sa disposition afin de porter son projet.
Le choix du statut juridique, qui sera adopté pour développer le projet d’entreprise de façon optimale et accueillir ses activités, est dès lors déterminant.
Ce choix doit être opéré, d’une part après analyse des avantages et des contraintes spécifiques à chacun des statuts juridiques existants, d’autre part en fonction de plusieurs critères, propres à la nature des activités envisagées et aux priorités données au projet.

L’entrepreneur doit en effet prendre en compte l’ensemble des problématiques résultant de :

  1. La forme juridique appropriée (entreprise individuelle, société),
  2. Le statut social du dirigeant,
  3. Le régime fiscal,
  4. Les obligations administratives,
  5. La responsabilité du chef d’entreprise.

La réponse à la première interrogation, à savoir celle de la forme juridique, conditionne les réponses apportées aux quatre problématiques qui suivent.
C’est donc le statut juridique qui conditionne le statut social du dirigeant, le régime fiscal, les obligations administratives et la responsabilité.
Il est dans ces conditions, impératif de mener une réflexion approfondie avant de faire le choix du statut juridique.
Cette réflexion passe naturellement par une étude des différentes formes juridiques afin de savoir laquelle est la mieux adaptée au projet.

La première question posée de façon classique par le porteur de projet, est celle de l’exercice de l’activité à titre individuel (I) ou le développement du projet au sein d’une société (II).

I. L’entreprise individuelle

Dans notre environnement économique local, la majeure partie des entreprises sont structurées sous la forme d’entreprises individuelles, ce qui correspond à une réalité de terrain résultant du nombre important de très petites entreprises.
Dans cette hypothèse, le choix de l’exercice de l’activité sous la forme de l’entreprise individuelle est justifié par le peu de contraintes administratives et financières qu’elle induit.

Le statut de l’entreprise individuelle présente en effet des avantages appréciés des petites entités en raison du peu de formalités à assumer tant au stade de la création que dans le cadre du fonctionnement au quotidien.
Ainsi, la création de l’entreprise individuelle ne nécessite ni la rédaction de statuts, ni l’investissement en capital social. En outre, elle n’est soumise qu’à une comptabilité recettes-dépenses assez facile à tenir. En bref, elle offre une rapidité dans les formalités de création et une facilité dans la gestion, tout en permettant de lancer son projet à moindres frais.

L’entrepreneur exerçant à titre individuel peut opter pour le régime fiscal avantageux de la micro-entreprise sous la condition de ne pas dépasser certains seuils de chiffre d’affaires.

En revanche, le statut de l’entreprise individuel présente un inconvénient majeur.

L’entreprise ne dispose pas de la personnalité morale, elle se confond avec la personnalité juridique du dirigeant qui répond des dettes de l’entité sur ses propres deniers et ses biens.
L’entrepreneur exerçant à titre individuel ne met donc pas le patrimoine de sa famille à l’abri des risques inhérents à son activité (saisie des créanciers, liquidation judiciaire).
Le futur exploitant devra alors s’il est marié, opérer au besoin un changement de régime matrimonial pour adopter le régime de la séparation des biens afin de préserver le patrimoine de son conjoint.

De même, il aura la possibilité de faire par acte notarié, une déclaration d’insaisissabilité de sa résidence principale, ce qui représente en somme une protection assez limitée au regard des enjeux financiers d’une activité professionnelle, surtout si le chef d’entreprise détient un patrimoine conséquent.
Afin d’encourager l’entreprenariat et protéger de façon plus efficace l’exploitant, la loi a créé le statut de l’entreprise individuelle à responsabilité limité (EIRL), qui répond aux mêmes critères de rapidité dans la création et de simplicité dans la gestion, tout en donnant la possibilité à l’entrepreneur de procéder à une déclaration d’affectation du patrimoine dédié à l’activité professionnelle et sur lequel ses créanciers à ce titre pourront agir en cas de défaillance de l’entreprise. Le patrimoine qui n’aura pas été affecté à l’EIRL ne pourra être impacté par les difficultés de l’entreprise ou l’action des créanciers.
Ceci étant, si les avantages liés à l’entreprise individuels sont appréciables, le statut juridique de ce type de structure n’apporte pas toujours les solutions adaptées au projet envisagé.

Comme nous l’avons vu, l’entreprise individuelle trouve ses limites dans la protection du patrimoine personnel de l’exploitant.
Par ailleurs, l’entreprise individuelle ne connaît pas la notion de capital social, lequel constitue en quelque sorte le gage des créanciers et assure dans le même temps la crédibilité financière de l’entreprise.
En outre, le statut de l’entreprise individuelle ne permet pas toujours de restituer de façon claire la valeur de l’activité contrairement au statut de société qui induit une comptabilité d’engagement et l’établissement d’un bilan.
Enfin, le statut de l’entreprise individuelle ne répond pas toujours aux exigences liées au développement du chiffre d’affaires et de l’activité car elle ne peut accueillir d’autres investisseurs, demeurant par essence une structure individuelle.

C’est la raison pour laquelle, s’il est toujours possible d’adopter l’exploitation à titre individuel en phase de lancement et au cours des premières années d’activité, la question du passage au statut de société peut être cruciale notamment au moment où les structures atteignent une taille critique.

Il est à préciser que l’entrepreneur peut d’emblée et pour les limites déjà évoquées au statut individuel, opter pour l’exercice de son activité en société s’il estime pouvoir assumer les contraintes qui en résultent.

II. L’entreprise sous forme de société

Les dispositions légales offrent à l’entrepreneur qui désire structurer son activité au sein d’une société, une diversité dans le choix des formes juridiques.

Il s’agit là encore de procéder à une analyse judicieuse, tenant compte à la fois des priorités du dirigeant d’entreprise sur les aspects fiscaux et sociaux et des impératifs de développement.
L’objectif ici n’étant pas de faire l’inventaire de l’ensemble des formes juridiques, il convient néanmoins, dans le travail d’analyse qui sera assuré par le porteur de projet avec ses partenaires conseils, d’étudier les avantages et les inconvénients liés au choix qu’il aura fait et d’en évaluer les conséquences.

Globalement, la forme juridique de société implique :

  • La rédaction de statuts,
  • Des formalités de création (enregistrement, publication, dépôt des formalités au greffe, immatriculation),
  • Le dépôt sur un compte bancaire d’une somme représentant le capital social,
  • La tenue d’une comptabilité d’engagement avec établissement de bilans,
  • La tenue des assemblées générales.

Le choix de la société implique donc une organisation plus lourde tant sur le plan de la création que sur celui du fonctionnement, et qui peut apparaître comme un inconvénient pour un porteur de projet disposant de peu de moyens.
En revanche, en considération des enjeux en cause et de l’importance de se prémunir de choix inappropriés qui peuvent conditionner la viabilité du projet, il est conseillé à l’entrepreneur ayant opté pour la mise en place d’un business plan, d’intégrer l’ensemble des coûts d’accompagnement, pris en charge faut-il le rappeler, par une structure distincte en formation et pas forcément sur ses propres deniers.

Sans être exhaustif, plusieurs types de sociétés parmi les plus usitées peuvent être examinés dans la perspective du statut juridique à adopter :

  • L’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL),
  • La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU),
  • La société à responsabilité limitée (SARL),
  • La société anonyme (SA),
  • La société par actions simplifiée (SAS),
  • La société en nom collectif (SNC),
  • La société coopérative de production (SCOP).

Les SNC et les SCOP existent un peu à la marge et les SA sont par leur régime légal (montant du capital minimum de 37 000 euros et nombre d’associés minimum de 7), réservées aux projets de grande envergure.

La SARL est la forme la plus connue et la plus répandue. Le montant du capital est librement fixé par les associés, qui doivent être au minimum au nombre de 2, et au maximum de 100.

Les règles de fonctionnement de la SARL sont très largement précisées par les dispositions légales et la rédaction des statuts est donc très encadrée par le code de commerce.
La SAS fit jadis une société réservée aux projets importants, en raison du montant exigé de son capital social (37 000 euros). Elle est aujourd’hui accessible du fait de la possibilité pour les associés de choisir le montant du capital social sans minimum.
Mais la SAS est surtout très prisée aujourd’hui en raison d’une part, de la liberté contractuelle qui prévaut dans le cadre de la rédaction des statuts, d’autre part de la faculté pour le dirigeant d’opter pour le régime des « assimilés-salariés ».
En tout état de cause, la structure choisie tiendra compte d’un certain nombre de priorités prédéfinies ou revues en fonction de l’évolution de l’activité.

Si la priorité de l’entrepreneur consiste à mener seul son projet tout en protégeant son patrimoine et tout en apportant une plus grande crédibilité à sa structure notamment par de l’apport en numéraire, il pourra opter pour une forme de société à associé unique (EURL, SASU…).
S’il est prévu en outre d’intégrer plusieurs associés ou plusieurs investisseurs au sein du projet, il conviendra d’opter pour une SARL ou pour une SAS.
La SARL répondra favorablement à la problématique du besoin d’encadrement par la loi des règles de fonctionnement et partant, d’un accompagnement par un professionnel qui soit plus allégé au stade de la création.

Mais, comme il a été rappelé ci-avant, la SARL n’offre guère de liberté sur les modalités de fonctionnement, avec parfois des règles strictes qui ne correspondent pas toujours aux exigences de rapidité de prise de décision dans la sphère économique actuelle.
De plus, le gérant majoritaire de la SARL est soumis au régime du travailleur indépendant avec toutes les contraintes que cela implique.
La SAS sera mise en avant pour le régime social déjà évoqué mais aussi lorsqu’il faudra mettre en place des statuts « cousu-main » pour assurer un mode de fonctionnement propre à l’esprit qui a gouverné le montage du projet et à la volonté de ses fondateurs.
Dans cette hypothèse, l’intervention d’un conseil paraît particulièrement opportune.
Le régime fiscal pourra également déterminer le choix opéré par l’entrepreneur : impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés.

Un dernier point, et non des moindres : la responsabilité civile, financière ou pénale de l’entrepreneur, qu’il exerce à titre individuel ou en société, est primordiale et mérite un article spécifique. Mais quoiqu’il en soit, l’entreprise n’est jamais le bien de l’entrepreneur et les règles de droit ont fixé un régime de protection de la personne morale ou du fonds de commerce en tant qu’entités distinctes, susceptibles d’être protégées contre les abus de leur créateur.